Tu te doutes que plus de trois ans de baston neuro-psychiatrique, ça laisse des traces.
Je ne te parle pas là de douleurs, d’épuisement, de trouille etc etc.
Nonon.
Il serait temps que tu apprennes le sens des priorités vitales, hein.
À quoi ça sert, sinon, que je me fende l’énergie à te péter régulièrement le moral en douze avec mes billets dits “sérieux” censés te montrer un bout du morceau du chose ?
Réfléchis, putain ! ... Non je ne t’appelle pas “putain”. Je sais que j’ai le vocabulaire fleuri d’un champion Savoyard de lancé de tronc d’arbre et d’avalage, au mètre, de poire (L’alcool qui te fait exploser l’émail des dents, pas le fruit) mais quand même ...
Vas-y concentre toi. Trois ans de gobage de médocs anti tout, anti-anxiété-sa-mère-j’respire-plus, anti dépression-gravassioneuses, anti-psych-oh-c’est-marrant-j’vois-et-j’entends-des-gens-qu’existent-pas et anti-crise-de-violence-tiens-et-si-je-me/te-passais-la-tête-à-travers-la-vitre, ajoutés à des mois de dépense de calories pas loin d’égaler celle de la moule dans le coma, c’est à dire à regarder dans le vide en bavant, avec pour seule autre activité le fait de te nourrir exclusivement d’aliments 100% lipidiques, ça donne quoi d’après toi ?
Ben ça donne que tu montes sur ta balance depuis des mois en hurlant que cette pute est une mythomane de première et qu’il est totalement impossible que tu aies ces six kilos en trop qu’elle t’annonce sur son écran con.
Ta mauvaise foi occulte, elle, les faits suivants :
- Tu ne rentres plus dans tes fringues de pétasse depuis autant de temps.
- Tu t’en sors pas trop mal, vu que la moyenne des gens dans ton presque cas en aurait pris plus de vingt, des kilos.
- Tu jures de te foutre au régime sec depuis plus de huit mois, parce qu’en plus, le gras, c’est pas bon pour le reste de ta santé. Et, bien sûr, tu ne le fais pas.
Bref ... Le peu de lucidité restant dans ton esprit s’évapore.
Cette salope ment, c’est tout. Tu la jettes. Et tu cours t’acheter (Entendre par là : Tu envoies Coloc’) un pèse-personne ultra sophisticos de sa race, aussi appelé “Impédancemètre”.
Oui.
Du genre qui, quand tu rentres ta taille, ton âge, ton sexe, ton niveau de sportivité et la bio de Sandra Bullock, te donne ton pourcentage d’eau et de graisse.
Si.
Tu es quelque peu névrotique, donc tu lis bien tout le petit guide de ta nouvelle amie (La balance, pas Sandra Bullock) pour bien imprimer dans ton obsessionalité que le taux de graisse normal se situerait, pour toi, entre 21 et 29 %, que quand ça affiche entre 30 et 33 c’est moyen mais pas top et qu’au dessus, c’est carrément le démon.
Tu sautes gaillardement sur l’engin forte de ton utopie hallucinée et le verdict tombe.
31.
31 % de gras-du-cul .
Impossible.
Par acquis de conscience, tu fais monter Coloc’ dessus qui, certes grand et mince, se nourrit aussi diététiquement que toi, voir plus. Juste pour vérifier qu'elle surdose, la chienne.
C’est là, que ta vie bascule dans le X-Filiage le plus total.
4 %.
Tu re-programmes la chose et tu fais remonter le bonhomme, hilare, dessus.
4 %.
De gras-d’où, du coup ?
Tu respires profondément, tu te calmes, et tu réagis comme une personne adulte saine d’esprit :
Tu colles des coups de pied à Monsieur 4 %, tu te mets à galoper hystériquement dans le couloir, les bras au ciel, en insultant la terre entière et en jurant “que puisque c’est comme ça, il me reste qu’à mourir, voilà !”.
Tu as donc, maintenant, le vrai sens des priorités de la vie.
Tu le savais que l’enfoiré peut manger de la végétaline pendant des semaines sans prendre un gramme. Tu avais même cru avoir trouvé la réponse à ce phénomène. Il n’a pas d’estomac. Il a l’œsophage directement relié au petit intestin. Ce qui explique cet étrange don et surtout le fait que Coloc’, ben il fait super beaucoup caca.
Mais la médecine t’a assuré que “Non ça c’est pas possible, Folie. Et tiens, reprends un cachet”.
Alors tu te concentres. Et l’illumination explicative ultime te saute à ta gueule, pas nettement le premier coup, mais une approche.
Il a le ver solitaire.
Tu lui hurles : “Hey, viens voir !”
Coloc, nature zenifiée innée, arrive. Avec le sourire. L’enculé.
Toi : “Pose le pied sur la chaise, là. Et tousse !”
Lui, grand habitué des étrangetés de toi : “Heu ... ok!”
Toi, lui mattant l’arrière train : “Rien qui sort. Ok attends attends !”
Tu files à la cuisine et reviens.
“Ayé ! Recommence ! Tousse !”
Coloc’, début d’inquiétude : “... Folie ? ... Pourrais-tu, s’il te plait, m’expliquer, sans te commander hein, pourquoi tu me secoues un lardon entre les jambes là ?”
Toi, logique : “Ben pour attirer et faire sortir ton ver solitaire tiens ! Ça aime le porc cru ces bestioles !”
Lui, calme : “Admettons que cette scène ne soit pas une totale hérésie et que ta théorie soit autre chose que profondément débile.... Il sort comment le ver ? Je suis en caleçon !”
Toi, mathématicienne : “Il est pas con, il glisse le long d’la jambe !”
Lui : “Tu sais ... Comment dire ... Je suis pas sûr qu’il s’agisse d’un ver soli....”
Toi, prix nobel de réflexion : “Oué... Je crois que t’as raison. C’est pas un truc solitaire. C’est pire que ça ... Bouge pas !”
Tu reviens avec ton chien le plus grassouille, la femelle (Pas de commentaire) et tu la secoues entre les genoux du grand mince.
Lui : “Putain mais merde ! Tu fous quoi là ?”
Toi, en pleine John Nashisation : “T’as pas tort ! C’est pas un ver ! 4% de gras, c’est forcément un anaconda.”
Coloc’ : “... ?”
Toi, braillante : “ JE TE DIS QUE T’AS UN ANACONDA GÉANT DANS LE BIDE PUTAIN ! DONC JE L’APPÂTE ! IL SORT J’LE NIQUE ET PAF T’ES GROS !”
Désespéré sur pattes : “ ... Un quoi ?”
Toi, secouant toujours ta chienne : “MERDE T’AS ANACONDA DANS TON CUL ! ...ET IL VEUT PAS SORTIR !”
Désespéré, mais en pire : “Tu veux parler du monstre du film merdique là ? Que Jennifer Lopez, elle se bat contre et que lui, il la suit partout pour la tuer ?”
Ton illumination se nettifie d’un coup.
C’est donc ça.
Le reptile con refuse de se laisser avoir par ton redoutable piège militaire parce qu’il est occupé.
Parce que, dans le cul de Coloc’, c’est une certitude, il y a aussi Jennifer Lopez. Indéniablement.
Et le serpent crétin, t’as vu le film, il a pour seul but de bouffer cette mondialement chieuse princesse latina.
Ce bête animal à sang froid, il la suit à la trace, la chiquita.
Partout.
Tu mets deux secondes trois dixièmes pour prendre ta décision.
Tu chopes ton sac.
Coloc’, abandonnant tout espoir : “euh ... là tu fais quoi ?”
Toi, solennelle : “Bouge surtout, surtout pas, j’en ai pas pour longtemps. J’vais te sauver la vie...”
Lui : “Mais encore ?”
Toi, héroïque : “.... Je vais acheter des tacos ...”